Un peu avant, j’ai écrit sur le Tsuboi-jizo qui accompagnait les condamnés à mort juste avant qu’ils ne soient décapités. Alors, je me suis rappelé qu’il y a aussi un autre Jizo qui remplissait une fonction très similaire à Kyoto. Son nom est « Owakare-jizo », en français « le Jizo d’adieu ». Un nom triste, n’est-ce pas ?
Owakare-jizo est situé dans le quartier Kamiya-cho le long de la rue d’Imadegawa-dori en face du sanctuaire du Kitano-tenman-gu. On ne peut pas le voir, parce qu’il est déifié dans une boîte fermée. Il est seulement représenté sous la forme d’une photo appuyée contre la boîte.
Ce Jizo était déifié originairement au village d’Obama dans la province de Wakasa (maintenant la préfecture de Fukui). Au début de l’époque Meiji (1867-1912), un mouvement anti-bouddhisme appelé « Haibutsu-kishaku » s’étendit dans cette région. Je voudrais expliquer d’abord ce que Haibutsu-kishaku signifie.
Dès le commencement de l’époque Edo (1603-1867), les temples bouddhiques avaient pour rôle d’administrer le peuple, par exemple, d’inscrire les gens sur le registre de l’état civil. Et ils coexistaient pacifiquement avec les sanctuaires shintos. Cette relation s’appelle Shinbutsu-shugo. Mais, au début de l’époque Meiji, le gouvernement décida de faire du shintoisme la religion d’Etat et essaya de séparer les deux religions « Shinbutsu-bunri ». Il classifia le shintoisme comme la religion propre au Japon et le bouddhisme comme celle de l’étranger.
Graduellement, le nombre de gens qui faisaient peu de cas du bouddhisme augmenta. Certaines personnes commencèrent à détruire les accessoires et les statues bouddhiques et même certains des temples. Cette sorte de mouvement s’appelle « Haibutsu-kishaku », en français « L’abolition du bouddhisme et le refus de l’enseignement de Bouddha. »
Pour protéger le Jizo contre le danger de ce mouvement brutal, un vieux bonze le porta sur son dos et vint d’Obama à Kyoto, franchissant à pieds la longue distance. Mais quand il parvint au quartier Kamiya-cho, il n’avait plus de force et mourut. Les gens qui ne pouvaient pas ignorer le Jizo abandonné au bord du chemin bâtirent un petit temple pour qu’on puisse le prier comme il se doit.
A cette époque-là, il y avait, tout près de ce temple, un grand crématorium. Donc, les cortèges funèbres passaient souvent devant le Jizo. Naturellement, les participants des cortèges commencèrent à dire adieu au mort devant le Jizo, lui demandant qu’il protège le mort sur le chemin de l’autre monde. Pourquoi ?
Originairement, le Jizo est le dieu tutélaire des voyageurs. Donc, il se dresse souvent à l’extrémité des villages pour accompagner ou accueillir les voyageurs qui partent ou arrivent. Evidemment, il les protège pendant tout leur parcours. Même dans le cas du dernier voyage pour l’autre monde, le Jizo s’acquitte de ces fonctions.
Le bonze qui rendit le dernier souffle dans le quartier Kamiya-cho où il y avait un crématorium tout près permit au Jizo de déployer ses compétences au maximum.